LA UNE

🇦🇲 Arménie – 🇦🇿 Azerbaïdjan – 🇹🇷 Turquie • Une route de 32 km qui redessine l’équilibre du Caucase

Autour d’un mince corridor au sud de l’Arménie, la tension régionale monte d’un cran. Bakou, soutenu par Ankara, exige l’ouverture du couloir de Zanguezour pour relier son territoire à l’enclave du Nakhitchevan, puis à la Turquie et à l’Asie centrale. Erevan y voit une menace directe contre sa souveraineté, craignant de perdre le contrôle de sa frontière avec l’Iran, seul passage vital depuis des décennies.

Les discussions entre le président azerbaïdjanais Ilham Aliev et le Premier ministre arménien Nikol Pachinian se sont intensifiées : une feuille de route a été esquissée au printemps, mais les exigences de Bakou — fin de la mission européenne de surveillance, révision de la Constitution arménienne, dissolution du groupe de Minsk — rendent l’accord fragile. Dans les coulisses, les États‑Unis pressent pour une solution rapide, tandis que Moscou observe avec inquiétude ce qui pourrait sonner la fin de son influence dans le Caucase.

Pour Ankara, l’enjeu dépasse largement la région : il s’agit de bâtir un corridor turc reliant la Méditerranée à la Chine, court‑circuitant la Russie et l’Iran. Washington et Tel‑Aviv y voient un axe commercial et énergétique stratégique, capable d’acheminer le gaz du Turkménistan et du Kazakhstan vers l’Europe. Mais à Erevan, les souvenirs du génocide et la rhétorique nationaliste turque font craindre un piège, d’autant que des responsables turcs ont proposé de baptiser le futur poste‑frontière du nom d’un des architectes de 1915.

La Russie, en retrait depuis la guerre de 2020, redoute ce réalignement régional. Bakou et Moscou s’affrontent désormais ouvertement, entre arrestations d’agents supposés et incidents impliquant la diaspora azerbaïdjanaise en Russie. Dans le même temps, l’Arménie s’émancipe de Moscou, a quitté l’OTSC et nationalisé des secteurs clés, au risque de provoquer de nouvelles tentatives de déstabilisation.

Pour le Premier ministre arménien, accepter le couloir reviendrait à briser l’isolement historique de son pays et à ouvrir la voie à des échanges avec ses voisins. Mais c’est aussi un pari risqué qui pourrait, à terme, compromettre l’intégrité territoriale arménienne face aux ambitions affichées de Bakou. Dans ce jeu de manœuvres et de pressions croisées, les 32 kilomètres de Zanguezour sont devenus l’épicentre d’une recomposition géopolitique dans le Caucase. Le Point

EN BREF

🇸🇾 Syrie • Nouveaux affrontements à Soueïda entre tribus et druzes

De violents affrontements ont éclaté aujourd’hui aux abords de Soueïda, dans le sud de la Syrie, entre combattants tribaux alliés aux autorités et groupes druzes retranchés dans plusieurs villages soutenus par Israël. Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme, les combats, accompagnés de tirs et d’explosions intermittentes, se concentrent à l’ouest de la ville, récemment désertée par les forces gouvernementales.

Des renforts tribaux, venus de régions comme Hama, ont rejoint les bédouins pour répondre à des appels à l’aide. Le village druze de Walgha est tombé sous leur contrôle, et des maisons, commerces et véhicules y brûlent encore. Israël a démenti avoir mené de nouvelles frappes dans la zone, après avoir bombardé plus tôt dans la semaine pour contraindre Damas à se retirer.

La flambée de violence a déjà fait près de 600 morts et déplacé 80 000 personnes selon l’OIM. Face à l’urgence humanitaire, Israël a annoncé un envoi d’aide d’une valeur de 2 millions de shekels pour les druzes de Syrie, tandis que l’ONU exige des enquêtes rapides et transparentes sur les exactions commises. France 24

🇮🇸 Islande • Soutien populaire pour relancer les négociations d’adhésion à l’UE

La ministre des Affaires étrangères islandaise, Þorgerður Katrín Gunnarsdóttir, affirme que le pays dispose désormais d’un soutien public suffisant pour relancer les pourparlers d’adhésion à l’Union européenne. Une consultation nationale est prévue d’ici 2027, alors que l’exécutif pro‑UE veut tirer parti du contexte géopolitique tendu entre Bruxelles et Washington.

L’Islande, membre de l’espace Schengen et de l’Espace économique européen, avait stoppé son processus d’adhésion en 2013. Selon un sondage récent, 58 % des Islandais approuvent la reprise des discussions, même si seuls 45 % se disent favorables à une adhésion pleine et entière. Les questions de pêche, d’agriculture et d’énergie restent des sujets sensibles.

La visite hier de la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, sur la base de Keflavik illustre la valeur stratégique de l’île. Tandis que Reykjavík renforce sa coopération militaire, les tensions commerciales entre l’UE et les États‑Unis pèsent lourd. Politico

🇪🇺 UE – 🇷🇺 Russie – 🇺🇦 Ukraine • L’UE adopte un 18e paquet de sanctions mais son efficacité n’est pas garantie

L’Union européenne a validé aujourd’hui un nouveau train de sanctions contre Moscou, présenté comme « le plus sévère » depuis le début de la guerre en Ukraine. Ce 18e paquet abaisse notamment le plafond du prix du pétrole brut russe, désormais fixé à 47,6 dollars le baril contre 60 auparavant. L’objectif affiché est de tarir une source essentielle de revenus pour le Kremlin et de tarir le flux de devises qui permet à Moscou de soutenir son invasion en Ukraine.

À Kyiv, Volodymyr Zelensky a salué une décision « essentielle ». Mais plusieurs analystes européens restent prudents : la Russie a réorienté son commerce vers des pays émergents qui ignorent les restrictions occidentales. Selon des experts comme Ulrich Bounat, sans l’adhésion pleine des États‑Unis et d’autres membres du G7, l’impact économique de ces mesures restera limité.

Le Kremlin, qui affirme s’être « adapté à la vie sous sanctions », promet d’étudier les nouvelles règles pour en limiter les effets. Sur le terrain diplomatique, Washington menace de sanctions secondaires plus dures, ce qui pourrait, selon des spécialistes, faire basculer le rapport de force mais au prix de fortes turbulences économiques mondiales. Le Parisien

🇧🇫 Burkina Faso • Dissolution de l’organe indépendant de contrôle électoral

Le gouvernement burkinabè a annoncé la dissolution de la Commission électorale nationale indépendante. Un projet de loi adopté en conseil des ministres sera soumis à l’Assemblée nationale de Transition. Le ministre de l’Administration du territoire, Émile Zerbo, reprend désormais l’organisation des scrutins, invoquant la volonté de réduire les coûts et d’éviter de fortes influences politiques ou étrangères. La mesure s’inscrit dans la « refondation de l’État » et intervient alors qu’aucune élection n’est prévue à moyen terme et que les partis politiques restent suspendus depuis 2022. RFI

🇧🇷 Brésil • Bolsonaro placé sous bracelet électronique avant son procès

La Cour suprême brésilienne a ordonné aujourd’hui à l’ancien président Jair Bolsonaro de porter un bracelet électronique, de rester assigné à domicile la nuit et le week‑end et d’éviter tout contact avec des ambassades étrangères. Cette décision survient alors que l’ex‑chef d’État est accusé d’avoir orchestré un plan pour conserver le pouvoir après sa défaite en 2022, incluant des discussions sur la neutralisation des institutions et, selon les procureurs, la connaissance d’un projet d’assassinat visant Lula et d’autres responsables.

Brasília défie le chantage de Trump, qui exige l’abandon des poursuites et menace d’imposer 50 % de droits de douane sur les importations brésiliennes dès le 1er août. La police fédérale a perquisitionné le domicile et le bureau de Bolsonaro, la justice justifie ces mesures par un risque de fuite, l’ex‑président ayant financé son fils pour faire pression à Washington. Bolsonaro dénonce « persécution » mais devra désormais se conformer strictement aux restrictions imposées par la plus haute juridiction du pays. The New York Times

🇺🇸 États‑Unis – 🇪🇺 Europe • Ingérence : des diplomates américains accusés de vouloir « évangéliser » l’Europe

2 émissaires du département d’État multiplient les rencontres sur le Vieux Continent pour défendre une liberté d’expression prétendument menacée. À Paris, Samuel D. Samson et Christopher J. Anderson ont confronté Reporters sans frontières, sans pouvoir démontrer de véritables atteintes à la liberté de la presse en France. Ils ont aussi approché des figures du Rassemblement national, tandis que Politico évoque une suggestion interne de les soutenir financièrement, information démentie par Washington.

Avant cela, ces envoyés spéciaux s’étaient rendus au Royaume‑Uni et en Irlande, critiquant la modération des réseaux sociaux et dénonçant le Digital Services Act européen. Selon une publication irlandaise, ils auraient même évoqué un chantage au visa pour protéger les entreprises américaines. Leur tournée révèle une stratégie assumée de l’administration Trump visant à encourager, en Europe, des forces politiques alignées sur une vision identitaire et religieuse. Le Monde