ANALYSE

🇷🇺 Russie • Une production de drones à plein régime

La Russie parvient à produire massivement des drones militaires malgré les lourdes sanctions internationales et les pertes importantes sur le champ de bataille. Ce paradoxe s’explique par une mobilisation industrielle totale, un appui technologique étranger et une capacité d’adaptation rapide.

Depuis 2022, Moscou a mis son économie au service de la guerre. L’industrie des drones bénéficie d’un soutien financier massif de l’état, impliquant à la fois entreprises publiques et privées. Des usines ont été ouvertes ou reconverties, notamment à Alabuga et Khabarovsk, avec des objectifs de production mensuelle allant jusqu’à 10 000 drones. La main-d’œuvre est recrutée en urgence, y compris à l’étranger, pour faire tourner ces chaînes de production 24h/24. Des techniciens iraniens ont même été envoyés sur place pour former les équipes russes.

La Russie n’aurait pas pu atteindre de tels volumes sans l’appui discret de ses alliés. L’Iran lui a transféré la technologie des drones Shahed, lui permettant de les produire localement sous le nom Geran. De son côté, la Chine fournit l’essentiel des composants électroniques, ainsi qu’un appui logistique et industriel via des partenariats avec des entreprises russes. Sans livrer directement d’armes, Pékin joue un rôle central dans l’approvisionnement de Moscou en technologies critiques.

La Russie contourne aussi habilement les sanctions occidentales. Elle s’approvisionne via des réseaux complexes impliquant des pays tiers comme la Turquie, les Émirats ou l’Arménie. Des composants occidentaux, notamment américains, continuent d’alimenter l’industrie russe, souvent par l’intermédiaire de filières chinoises ou via des importateurs civils.

L’innovation joue enfin un rôle clé. Les drones russes sont conçus pour être relativement simples, bon marché et produits en masse. Leur évolution constante – meilleure autonomie, IA embarquée, charges explosives – renforce leur efficacité sur le terrain. Moscou emploie aussi des tactiques d’essaim pour saturer les défenses ukrainiennes, combinant drones FPV, kamikazes et drones de précision.

La Russie réussit à maintenir un rythme industriel élevé, avec une grande capacité de résilience face aux pertes. Alors que Moscou était très en retard au début du conflit en matière de drones, ce n’est plus du tout le cas aujourd’hui, à la fois sur le plan qualitatif quand quantitatif.

EN BREF

🇷🇺 Russie - 🇫🇷 France • Selon le chef d’état major des armées, Moscou a désigné Paris comme son principal adversaire en Europe

La Russie considère désormais la France comme son principal ennemi en Europe, selon les déclarations du chef d’état-major français Thierry Burkhard. Lors d’une conférence de presse ce matin, le général a indiqué que Vladimir Poutine lui-même aurait tenu ces propos, en raison du soutien militaire et politique constant de Paris à l’Ukraine.

Si une attaque massive contre le territoire français est jugée très peu probable, la menace est d’une autre nature : Moscou déploie un arsenal d’actions hybrides — désinformation, cyberattaques, espionnage ou manœuvres de satellites. La Russie serait également active dans les fonds marins, les airs et l’espace, ciblant infrastructures et intérêts stratégiques européens, en particulier ceux de la France et du Royaume-Uni.

Autre sujet évoqué lors de la conférence de presse : l’Afrique. L’armée française poursuit sa réorganisation en Afrique, où plusieurs bases permanentes ont été fermées. Paris ambitionne d’y reconstruire une présence plus équilibrée, fondée sur une coopération nouvelle avec les États partenaires. France 24

🇺🇸 États-Unis - 🇺🇦 Ukraine • Trump relance les livraisons d’armes via l’OTAN

Donald Trump prévoit de reprendre les livraisons d’armes à l’Ukraine en contournant l’arrêt temporaire imposé par le Pentagone (selon le récit officiel de la Maison Blanche) : les équipements seraient désormais vendus aux alliés de l’Otan, qui les transféreraient ensuite à Kyiv. Ce revirement intervient alors que Trump exprime sa frustration croissante face à l’inaction de Vladimir Poutine sur le front diplomatique.

Selon The Guardian, Trump a confirmé avoir passé un accord avec plusieurs dirigeants de l’Alliance, tandis que son émissaire en Ukraine, Keith Kellogg, est attendu à Kyiv en début de semaine. Cette approche permettrait à Washington de ne pas livrer directement des armes à l’Ukraine tout en lui garantissant un soutien militaire, notamment en Patriot, HIMARS et munitions de 155 mm, indispensables face aux bombardements russes.

Parallèlement, Trump a soutenu une nouvelle proposition de loi sur des sanctions renforcées contre Moscou, incluant une surtaxe de 500 % sur les importations en provenance de pays achetant des produits russes, comme la Chine ou l’Inde. Un signal fort de durcissement stratégique, à l’approche d’un possible “grand discours sur la Russie” lundi.

Restons tout de même prudents et sceptiques : celui qui devait régler le conflit en 24h à son arrivée au pouvoir lance régulièrement des ultimatums de 15 jours aux belligérants sinon “ils vont voir”. Pour le moment, ils n’ont rien vu, en particulier du côté de Moscou. The Guardian

🇵🇸 Gaza • Près de 800 morts autour des distributions alimentaires depuis fin mai

Depuis la fin mai, au moins 798 Palestiniens ont été tués en tentant d’accéder à l’aide humanitaire à Gaza, selon le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme. Parmi eux, 615 sont morts à proximité des sites de la Gaza Humanitarian Foundation (GHF), entité soutenue par les États-Unis et Israël, accusée de compromettre l’impartialité humanitaire.

Créée comme alternative au système onusien, la GHF emploie des mercenaires américains et gère seulement 4 zones de distribution, contre 400 précédemment. Les conditions d’accès sont strictes, les risques de tirs fréquents. L’ONG Médecins sans frontières alerte sur une flambée de malnutrition aiguë, avec des cas multipliés par 4 en 2 mois.

À Rafah, 10 civils ont encore été tués aujourd’hui lors d’un tir israélien sur une foule, tandis qu’au nord de Gaza, une frappe a visé une école-refuge, faisant 15 morts. Le chaos hospitalier s’intensifie, les structures étant submergées, bombardées ou privées d’électricité.

Alors que les négociations de cessez-le-feu piétinent, les bombardements israéliens se poursuivent. The Guardian

🇺🇸 États-Unis - 🇵🇸 Palestine • Washington sanctionne une enquêtrice de l’ONU sur Gaza, qui répond

La rapporteuse spéciale de l’ONU sur les territoires palestiniens, Francesca Albanese, a été placée sous sanctions cette semaine par l’administration Trump pour ses prises de position sur la guerre à Gaza. L’annonce, critiquée par plusieurs responsables onusiens, marque un tournant dans la pression exercée par Washington contre les institutions internationales dénonçant les actions israéliennes.

Indépendante dans ses fonctions, Albanese avait récemment intensifié ses appels à des sanctions contre Israël et soutenu les poursuites de la CPI contre des responsables israéliens. Elle a également publié un rapport désignant plusieurs entreprises américaines comme complices présumées de la guerre menée à Gaza. La Maison Blanche l’accuse désormais de “guerre politique et économique” contre les États-Unis et Israël.

Pour Albanese, cette sanction reflète une forme de “culpabilité des puissants face à ceux qui défendent les opprimés”. Elle a appelé à garder les yeux rivés sur Gaza, où les civils subissent la guerre de plein fouet.

🇲🇱 Mali • Assimi Goïta s’octroie un mandat présidentiel illimité

Le général Assimi Goïta, chef de la junte au pouvoir au Mali, a promulgué une loi lui accordant un mandat présidentiel renouvelable sans limite de durée, sans passer par une élection. Le texte, diffusé hier, indique qu’il restera à la tête de l’État “jusqu’à la pacification du pays”, au moins jusqu’en 2030.

La mesure, issue d’une concertation nationale largement boycottée par l’opposition, s’inscrit dans une série de restrictions des libertés : dissolution des partis politiques, interdiction de réunion et répression des voix dissidentes. Initialement, les militaires s’étaient engagés à rendre le pouvoir aux civils en mars 2024, promesse non tenue.

Dans un pays en proie à une grave crise sécuritaire depuis plus d’une décennie, l’armée et ses alliés russes d’Africa Corps sont également accusés d’exactions contre les civils. Le Monde